L’huile d’origan - Propriétés et utilisations

Introduction

L’Origanum vulgare (nom latin de l’origan) a fait l’objet de nombreuses études en raison de ses usages cliniques potentiels tout à la fois intéressants et stimulants, et peut-être aussi du fait de la tendance actuelle, dans plusieurs secteurs industriels, à remplacer les substances chimiques de synthèse par des produits naturels aux propriétés similaires. Beaucoup de composants bioactifs sont présents dans les plantes aromatiques et peuvent en être extraits de plusieurs façons. Les principaux composants de l’huile essentielle d’origan mis en évidence par une étude sont le carvacrol, l’alcool bêta-fenchyl, le thymol et le gamma-terpinène (1). L’extraction à l’eau chaude constitue la meilleure méthode pour en préserver les propriétés antioxydantes et obtenir la plus forte concentration en phénol. La même étude a également testé des extraits d’origan contre sept cultures bactériennes différentes, mais sans résultat. L’huile essentielle elle-même a pourtant pu inhiber la croissance de toutes les bactéries, avec des réductions plus importantes sur les deux souches de Listeria testées.

Dans une autre étude, les principaux composants de l’origan identifiés sont le limonène, le gamma-caryophyllène, le rho-cymène, le camphre, le linalol, l’alpha-pinène, le carvacrol et le thymol (2). Certains coïncident avec l’étude précédente, d’autres non, peut-être parce que le terme « origan » recouvre plusieurs espèces différentes. Les plus communes sont le genre Origanum, originaire d’Europe, et le genre Lippia, originaire du Mexique. La composition de l’origan dépend aussi du climat, de l’altitude, du moment de la cueillette, et de l’étape de son développement (de même que la plupart des plantes cultivées). Cette étude a révélé que l’origan avait de bonnes propriétés antioxydantes, ainsi qu’une activité antimicrobienne contre plusieurs microorganismes dangereux tels que Salmonella, E. coli et Staphylococcus. En conséquence, l’ajout d’origan à certains aliments peut les rendre plus sûrs et plus stables. Il existe aussi quelques témoignages concernant les propriétés antimutagènes et anticancérigènes de l’origan, ce qui signifie qu’il pourrait avoir une utilité comme thérapie d’appoint dans le traitement du cancer. Une publication distincte indique qu’un autre composant actif de l’origan (le bêta-caryophyllène) a des propriétés anti-inflammatoires, qui pourraient être utiles contre l’ostéoporose et l’artériosclérose. Il est à noter que certains témoignages font état d’une utilisation externe d’huile d’origan comme insectifuge. Nous allons explorer dans cet article quelques-unes des preuves scientifiques de ces propriétés.

Une étude récente a établi que l’origan du Mexique (Lippia berlandieri Shauer, pour être précis) avait une activité antifongique (3). Les composants antifongiques font partie du métabolisme secondaire de la plante, et leur action peut être utilisée pour inhiber la dégradation de certains aliments. Dans cette étude, des moisissures ont été prélevées sur des fruits et légumes avariés et identifiées selon leurs caractéristiques morphologiques. De l’origan a été ajouté, sous forme sèche, dans la proportion de 0,25 à 4%. Vingt-et-une souches fongiques ont été identifiées. Pour sept d’entre elles, aucun effet inhibiteur n’a pu être observé. Pour 12 autres, par contre, un fort effet inhibiteur a été mis en évidence. L’huile essentielle d’origan a eu un effet inhibiteur sur toutes les souches, mais avec une amplitude variable (3). Des effets similaires ont été notés avec d’autres variétés d’origan, dont la plus commune, l’Origanum vulgare (4). Dans cette étude, l'huile d'origan était testée sur des moisissures développées à la surface de saucisses espagnoles fermentées. Les résultats ont montré une réduction spectaculaire des moisissures contaminantes. Ici encore, certaines souches étaient plus affectées que d’autres. Il n’y a pas eu d’effet sur le processus de dessiccation des saucisses, le pH, l'activité hydrique, ni sur les évolutions chromatiques pendant la maturation. Il existe donc un large éventail de preuves des propriétés antimicrobiennes de l’origan dans l’alimentation, aussi bien que dans les études animales et in vitro, mais qu’en est-il pour la santé humaine ?

Une étude a analysé l’utilisation d’huile d’origan sur les organismes parasites chez l’homme (5). 14 patients adultes dont les selles contenaient des parasites entériques (notamment Blastocystis hominis, Entamoeba hartmanni, et Endolimax nana) ont reçu de l’huile d’origan par voie orale. Après six semaines de supplémentation quotidienne à 600 mg d’huile émulsifiée, il y avait disparition complète de Entamoeba hartmanni (4 cas), Endolimax nana (1 cas), et Blastocystis hominis (8 cas), ainsi qu’une atténuation des symptômes gastro-intestinaux chez 7 des 11 patients porteurs du Blastocystis hominis (5). Il s’agit pratiquement des seules données disponibles concernant l’homme, prometteuses quant aux effets antimicrobiens de l’huile d’origan, mais trop limitées. Il existe bien des façons de tuer des bactéries dans un tube à essai, ce qui ne veut pas dire qu’elles seront aussi efficaces chez l’homme – gardons-nous donc des conclusions trop hâtives.

L’huile d’origan peut avoir une action anti-inflammatoire. Des chercheurs de Zurich ont découvert que l’un des composants actifs mentionnés plus haut (le bêta-caryophyllène, ou E-BCP) avait une action anti-inflammatoire (6). Les chercheurs ont administré de l’E-BCP à des souris atteintes d’inflammations des pattes. Dans sept cas sur dix, il y a eu une amélioration des symptômes. Il est à noter que l’E-BCP est également présent dans d’autres plantes aromatiques, notamment le basilic, le romarin, la cannelle et le poivre noir. L’E-BCP se lie à des récepteurs spécifiques de la membrane cellulaire (appelés récepteurs cannabinoïdes CB2), entrainant des modifications dans le comportement cellulaire. Les auteurs suggèrent que l’E-BCP pourrait peut-être servir de base pour de nouveaux médicaments. Contrairement à d’autres substances qui touchent les mêmes récepteurs, l’E-BCP ne provoque pas d’intoxication. Il pourrait également être utilisé dans le traitement de troubles chroniques comme l’ostéoporose et la maladie de Crohn (due à une inflammation du tube digestif).

Les huiles essentielles peuvent en général être utilisées localement, et l’huile d’origan ne fait pas exception. Appliquées localement, les huiles essentielles favorisent l’activité anti-inflammatoire, et agissent aussi comme anesthésiants. Elles peuvent donc apporter un soulagement en cas de contusion, d’entorse, ou d’autres troubles tels que la tendinite ou le syndrome du canal carpien. Les personnes atteintes d’arthrite peuvent également constater un soulagement par l’application d’huile sur les articulations. En cas de réaction cutanée, il possible que vous soyez allergique à l’un des composants, auquel cas cette thérapie ne serait pas indiquée pour vous. À propos de risques, assurez-vous d’éviter les zones cutanées sensibles, les muqueuses et les yeux.

Les études disponibles sur les effets anti-inflammatoires de l’origan sur l’homme sont limitées, mais les autres études montrent des résultats prometteurs. Dans l’une d’entre elles, les chercheurs ont montré que les extraits et les composants de l’origan peuvent contenir l’inflammation, que ce soit in vitro ou chez l’animal. L’un des constituants, le thymol, inhibe la libération de l’élastase (un marqueur d’activité pathologique inflammatoire) provenant de cellules immunitaires humaines (7). Dans une autre étude animale, de l’huile d’origan a été administrée à des rats par voie rectale ou dans l’alimentation, et a montré des effets protecteurs contre les lésions induites du côlon, l’infiltration de cellules inflammatoires et la dilatation vasculaire, ainsi qu’une répression des cytokines inflammatoires (8). Une fois encore, cela ne veut pas nécessairement dire que ces résultats sont directement transposables à l’homme, mais ils sont tout de même prometteurs.

Beaucoup des composants de l’origan que nous avons mentionnés ont des propriétés antiprolifératives (ou anticancéreuses). Dans plusieurs études cellulaires, l’extrait d’origan a protégé les cellules des lésions dues au stress oxydatif et des effets des rayons sur l’ADN (9). Le thymol, notamment, a montré qu’il protégeait l’ADN contre divers facteurs pathogènes, et qu’il limitait la prolifération des cellules cancéreuses avec des oncogènes actifs. On a aussi montré qu’il pouvait contenir des cellules de mélanome in vitro.

Enfin, l’origan a été utilisé dans plusieurs médecines traditionnelles contre des troubles tels que l’asthme, la diarrhée et l’indigestion. D’après les données disponibles, plusieurs composants et constituants peuvent être extraits de l’origan grâce à diverses méthodes, mais l’huile essentielle a semble-t-il les effets cliniques les plus nets. L’origan peut être ajouté en petite quantité à certains aliments pour améliorer leur conservation. Concernant la santé humaine, beaucoup de ses composants ont des propriétés antimicrobiennes. Nous nous sommes intéressé surtout aux effets antifongiques et antiparasitaires de l’origan, mais de nombreuses études disponibles mettent aussi en évidence ses propriétés antimicrobiennes, y compris son action antibactérienne et antivirale. La seule étude de l’huile d’origan sur l’homme est un petit essai montrant son efficacité dans le traitement des parasites intestinaux.

De nombreux constituants de l’origan, en particulier l’E-BCP, ont révélé une action anti-inflammatoire. Bien que les études n’aient pas été menées directement sur l’homme, elles sont encourageantes et montrent une réduction des divers types d’inflammation, y compris par les récepteurs cannabinoïdes CB2, tout en supprimant les cytokines inflammatoires. Pour finir, l’huile d’origan possède encore d’autres propriétés que nous n’avons pas abordées dans cet article, notamment des études préliminaires montrant ses bienfaits sur le système cardiovasculaire et le système nerveux, et des propriétés telles que la régulation des taux de glucose et de lipides (10). On doit pourtant se rappeler que, même si beaucoup d’études sont extrêmement prometteuses, cela ne constitue pas une garantie que l’huile d’origan sera efficace dans votre cas. Il est toujours conseillé de rencontrer votre médecin naturopathe pour une évaluation approfondie et un projet de traitement complet.